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 La méditation et les méditations

 

La méditation est un état, une conscience plus aiguë et plus vaste, en fait une perception plus ou moins vive du Réel, que nous avons appelé l’arrière-plan dans le cours précédent.

Dans un premier temps nous reconnaissons l’arrière-plan à l’extérieur comme au plus profond de notre être ; dans un second temps nous reconnaissons qu’il n’y a pas de  différence entre extérieur et intérieur, pour le dire plus justement, nous reconnaissons qu’il n’y a ni intérieur ni extérieur.

La méditation est abordée, sauf exception qui dépasse le cadre de cet exposé, avec un support[1] : il s’agit donc d’une technique, d’un moyen. Ces moyens sont nombreux et propres à chaque tradition. Dans ce contexte nous pouvons parler des méditations. Le mot sanscrit dhyana désigne ’l’état de méditation“. Le Shivaïsme du Cachemire désigne les méditations qu’il propose, notamment dans le Vijnanabhairavatantra, sous un autre terme sanscrit, dharana[2] qui prend dans ce contexte le sens d’exercice, d’entrainement de l’esprit[3].

 

Les méthodes de méditation classiques sont globalement de deux sortes, celles qui reposent sur la concentration et celles qui font appel à l’observation ; en réalité il n’y a pas réellement de frontière entre les deux approches. Pour la commodité de l’exposé gardons cette distinction.

Les moyens utilisés par la première catégorie portent sur l’action de chasser toutes les pensées, ou de maintenir une seule pensée à l’exclusion de toutes les autres, ou bien il s’agit de la répétition d’un mantra, de l’évocation de l’image d’une divinité, ou encore de fixer l’attention sur un lieu particulier du corps.

La seconde catégorie se sert de l’observation du souffle, ou de l’observation sans choix des pensées, autrement dit il ne s’agit plus de chasser les pensées parasites mais simplement d’en observer le va-et-vient, de la même façon que l’on observe le flux et le reflux des vagues ; le bouddhisme quant à lui utilise fréquemment l’observation des sensations.

Parmi ces moyens la plupart sont considérés comme des préparations à des techniques plus avancées.

L’approche du Shivaïsme du Cachemire est inclusive : il accepte toutes les méthodes, chacune ayant son utilité. Mais fondamentalement il privilégie la vie quotidienne comme champ d’expérience : toute situation, tout évènement, tout objet constitue une opportunité de prise de conscience de l’arrière-plan. La méditation devient Reconnaissance : reconnaissance du réel (l’arrière-plan, l’Autre Chose de Krishnamurti) que chaque objet, chaque évènement cache et révèle à la fois. L’objet principal de cette reconnaissance est le corps : la méditation emprunte volontiers la voie de la sensation corporelle, et celle de la perception directe[4]. Sur ce dernier point le Shivaïsme du Cachemire rejoint Krishnamurti.

 

            En conclusion retenons que si la méditation est un état (j’utilise ce mot par simple commodité) elle peut être spontanée ou être le résultat d’une pratique de l’un ou l’autre des systèmes de méditations.

En fait il existe deux écoles : l’une affirme la nécessité d’un “entraînement“ selon un processus, l’autre nie le processus et enseigne la voie directe, qui apparait comme une non-voie. Finalement les deux se rejoignent car au terme du processus il n’y a plus de voie.

 

 

[1]  Les différents courants spirituels de l’Inde s’accordent à distinguer la méditation avec support et la méditation sans support, les termes les désignant étant propres à chacun de ces enseignements.

[2]  Dharana : popularisé dans les livres sur le Yoga, où il fait référence au système classique du Yoga de Patanjali, ce terme est traduit par le mot concentration, avec un sens bien particulier : celui de l’exclusion du champ de conscience de tout objet autre que celui utilisé pour immobiliser le mental. En termes simples il s’agit de focaliser le mental sur un seul objet (une pensée, une image, un mantra etc), à l’exclusion de tout autre objet.

[3]  L’entraînement de l’esprit est une notion fondamentale du bouddhisme tibétain ; le Shivaïsme du Cachemire a fait de nombreux emprunts à cette tradition.

[4]  La perception directe fera l‘objet d’un cours dédié.

La pratique

Prenez au moins 5 minutes, 15 minutes dans l’idéal, cela suffit. Reprenez les indications du cours précédent quant à la position.

La semaine dernière nous avons mis l’attention sur les sensations, aujourd’hui ce sera sur les pensées, les images mentales. Vous allez faire l’expérience des deux voies qui viennent d’être exposées.

Posez-vous comme vous l’avez fait la fois précédente. Très probablement des pensées, des images mentales ne tarderont pas à faire leur apparition ; alors contrôlez votre mental, c’est-à-dire chassez ces pensées, ces images jusqu’à obtenir, si cela est possible le “vide de l’esprit“. Ce n’est pas la voie que nous privilégierons par la suite, et nous verrons pourquoi.

Dans un second temps, vous changez totalement d’attitude : vous observez simplement le va-et-vient des pensées, sans choix, comme lorsqu’on est assis au bord de la rivière et que l’on  regarde passer ses flots. Parmi ces pensées, (perçues à ce point où nous en sommes de notre cours, comme des perturbations) il ne manquera pas d’apparaître les commentaires sur ce que vous êtes en train de faire. Elles font partie du courant, comme les autres.

Prenez un instant avant de vous lever et reprenez vos activités quotidiennes sans vous laisser absorber par elles.

[1]  La perception directe fera l‘objet d’un cours dédié.

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